Another day of sun ‹ Capture 2

«Attentioooooooooon !»

Il vire à droite, puis à gauche. Vroum, vroum, ce Dullahan pourrait très bien être un cyclomoteur, ça ne changerait rien. Plus rapide que le vent, plus vif que la tempête, Nathaniel Miller s'élance au beau milieu de la piste cyclable tel un coup de tonnerre. La raison ? Le boulot. La dure labeur qui légitime le salaire des braves gens, cette même bonne excuse qui permet d'esquiver les soirées arrosées du jeudi soir. Avec le travail, on gagne son pain, et avec du pain, on peut saucer sa soupe. Eh oui Jamie, ça tombe sous le sens.

Et ce garçon, il est fiable. Quand on lui donne une tâche, il ne s'y prend pas à la dernière minute, il fait tout bien : il file à toute allure et s'occupe de sa besogne comme si un million de pokédollars était à la clé. Quitte à écraser d'autres usagers, ou même à mettre en danger ce pauvre Noisette recroquevillé dans le panier avant. Ah ouais, il fait moins le malin, là ! Ça passe son temps à aboyer, mais quand on roule à toute vitesse sur un deux roues, ça ne la ramène plus.

«FREINAGE. ACCROCHE-TOI !» Nath pose sa main sur le paquet à l'arrière, et de l'autre, freine de toutes ses forces pour éviter une masse sombre à tribord. Qu'est-ce que ça fiche là, ça ? Avec tout ce soleil, tout ce beau temps, il n'arrive pas à le distinguer, mais franchement, pour laisser des objets en plein milieu de la route, les gens sont vraiment dégueulasses.

Il n'y a plus de saison ma bonne dame.

HRP : Coucou, je demande l'apparition d'un pokémon sauvage grâce à ma bicyclette !

«Oh, c'est pas un colis abandonné, c'est un Pikachu.»

«PIKA !»

Ouais, Pika. Ou plutôt, il ferait mieux de la mettre en sourdine. Le machin arrive et traverse la piste sans pression, alors que des tarés roulent à toute vitesse et manquent d'écraser tout ce qui bouge. Mais lui, il continue son chemin au beau milieu des roues, comme si la vie n'avait pas d'importance. C'est quoi, un Pikachu émo-suicidaire ? Pas question de le laisser seul au cœur de tout ce chaos. Il risque de se faire tuer, ce con.

Nath fouille dans son pantalon. C'est un cas d'extrême urgence.

«Tu veux des baies ? J'en ai de toutes les sortes. C'est super bon, tu sais ? Allez, approche.»

Première technique pour attirer un pokémon : la bouffe. C'est vrai, la plupart de ces créatures sauvages n'agissent que par instinct de préservation, elles tentent d'accumuler le maximum de nourriture afin de survivre aux jours qui suivent. C'est assez basique, comme connaissance. Et le garçon, en bon apprenti ranger, tente donc de tirer parti de cette vérité pour se le mettre dans la poche. Noisette le regarde faire, encore un peu hébété par la course folle : en réalité, il se demande même si il ne devrait pas descendre tout de suite pour éviter un accident, mais c'est sans compter la vitesse du Dullahan qu'il ne peut malheureusement pas égaler.

Donc il attend. Tout ce qu'il espère, c'est que Nath va se manger un Coup d'Jus pour sa conduite irresponsable.

«Non ? Regarde, pourtant. J'ai des baies jaunes.» Il a oublié le nom. «Tu es jaune, toi aussi. Ça doit te donner faim, n'est-ce pas ?»

C'est quoi ce raisonnement de merde.

«PIKA !»

Mais ça marche ?

HRP : Je tente la capture ♥

Il mange. Sans aucune hésitation. Comment est-ce qu'il peut être aussi crédule ? Avec cet air benêt et cette candeur, le pauvre risque en baver dans la vie. Eh ! Il n'y a pas que des gentils usagers qui s'arrêtent pour donner la bectée aux Pikachu du voisinage, il y a aussi des racailles, des méchants voleurs, des criminels et tout une ribambelle d'agents du mal. Est-ce que ce pokémon veut faire passer un message ? Est-ce qu'il veut montrer à tous que le monde n'est pas si moche, qu'une lueur d'espoir y subsiste ? Peut-être n'est-il pas aussi stupide qu'il n'y parait. Ce Pikachu pourrait bien être le héraut d'une nouvelle philosophie.

«PIKA !»

Ou pas. Il est complètement con, ça se voit dans ses yeux. Et les yeux sont le reflet de l'âme. Voilà. Raison de plus pour l'embarquer, il va se faire écraser et ça va lui peser sur la conscience. Il faut protéger l'écosystème.

«Bon allez, monte sur le paquet.»

La souris saute sur le colis avec un air neutre. Oui, neutre, car sitôt posé sur son promontoire, il a déjà l'air de ne plus savoir où il se trouve. C'est quoi, ce machin ? Il est né de la dernière pluie ? Sérieusement, il doit avoir un traumatisme ou quelque chose du genre, car pour se comporter comme ça, il faut plus qu'un quotient intellectuel déplorable. Là, ça relève du mythe.

«Tu t'accroches bien à mon t-shirt, sinon tu vas te ramasser. Enfin, je veux dire, accroche-toi à tout ce que tu trouves. Je peux pas me stopper, hein ? Si tu tombes, tu te débrouille. Je suis pas censé m'arrêter sur la piste.»

La belle excuse, quand on pense qu'il est en plein milieu du chemin depuis déjà cinq minutes. Mais il a une livraison à faire pour Mamazon, et il doit l'effectuer dans les temps. C'est vrai ! Il a déjà assez perdu de ses précieuses secondes pour secourir le Edgykachu, et il y a quelqu'un qui attend sa cargaison de pamplemousses. Nan, là, il va falloir s'activer.

Nath vérifie que tout le monde est à bord, et d'un coup puissant du mollet, se met à pédaler. Encore une fois, sans respecter les limites de vitesse.

HRP : Merci pour la modération !