Ghost [Ft ...]

Depuis mon retour à Mhyone, j’explore l’île Mirabèce de fond en comble. Pour cause c’est l’un des seuls endroits de l’archipel que je n’ai pas encore entièrement cartographié. Je me promène dans la forêt rouge, aussi appelée forêt Amarante – bien que s’y promener n’ait rien de comique, comprenne qui pourra. Après un bon quart d’heure de marche et, comme à mon habitude, je me perds. Youhou. De toute évidence, je suis resté le même qu’il y a quelques mois. Le temps passe mais certaines choses ne changent pas : Mon sens de l’orientation est toujours aussi aiguisé. Deux voies s’offrent bientôt à moi et je ne sais absolument pas où mène chaque sentier. Ayant l’habilité à me repérer d’une huître – sans offense pour ces honorables mollusques – je pousse un bâillement et prends le chemin de droite. Pourquoi celui-ci au détriment de l’autre ? Qu’en sais-je. Il faut bien choisir de toute façon.

Je suis le sentier et sifflote pour me donner du courage. Car il en faut de la bravoure pour arpenter ce chemin sans paniquer. Je pense d’ailleurs être déjà venu ici. Mais quand ? Hum. Aucune idée. J’ai beau y réfléchir, je ne vois pas toujours pas. Je continue de marcher et cesse de siffler par la même occasion. En effet, je crois entendre des bruits et ne désire pas attirer l’attention sur moi. Bientôt et après quelques minutes de marche, me voici au cimetière. Super ! Encore cet endroit qui pue la mort, sans mauvais jeu de mot. Ça me revient maintenant. Je m’y étais rendu afin de … De … Hum … Oh bah ! Je ne sais même plus en fait. Comme quoi, ça ne devait pas être important – un peu comme les trois quarts des actions que je réalise sur cet archipel de toute façon. Bref, le fait est que je suis là. Je me retourne prestement afin de voir si miss Faylinn n’est pas dans mon dos. La dernière fois, la demoiselle aux cheveux roses bonbons était sortie de nul part et m’avait fichu une peur bleue. L’ancienne membre du Sigle – dont je n’ai pas eu de nouvelle depuis un bail – n’est visiblement pas là. Tant mieux. Ça m’aurait gonflé d’avoir à lui parler. Je tourne machinalement la tête de droite à gauche et vois sortir d’on ne sait trop où une demoiselle. Ah misère. Encore cette miss Faylinn. Qu’importe où je suis, elle réussira l’exploit de me trouver pour me raconter sa vie. VITE. FUYONS.

▬ …
Ah bah non. Ce n’est pas elle. Je plisse les yeux et crois reconnaître la personne qui me fait face. Ah oui. C’est Théodora Winchester. Comme les bijoux. Marrant ce nom d’ailleurs. Winchester, Firefly, O’Bowen, Faylinn, Wills, Lowell. Je crois que je suis le seul ici à avoir un nom qui respire la défaite. Sad story. Quoique … En y repensant. l’autre jour j’ai rencontré quelqu’un qui s’appelait Boote. Comme quoi il y a pire que moi. Je m’approche de miss Winchester et m’exclame :
▬ …
Un langage que seul les plus grands de ce monde sauraient saisir, assurément. Dans ce sombre décor, une aura mystique nous entoure. Mon Roigada s’avance lui aussi et fait désormais face au compagnon de la riche héritière. Comme pour valider mon propos, l’érudit insiste :
▬ …
Là encore des mots sages de la part d’un Pokémon sage dans un lieu tout aussi empli de sagesse.
Une page de l’histoire allait s’écrire aujourd’hui. À n’en pas douter.

Han. Comment a-t-elle osé ? Theodora utilise la technique ancestrale du pointage de doigt et complète son habile manœuvre d’un « … » des plus explicites. Un tel combo me laisse pantois cependant je parviens à rester debout malgré de telles allégations. Le Pokémon de la jeune femme s’approche et poursuit à son tour en énonçant un « … » empli de pugnacité. Face à autant de sagesse, je ne peux m’empêcher de faire quelques pas vers l’arrière. Comme si ces mots – ou plutôt ce silence en l’occurence – étaient trop intenses.

La véracité du propos de notre collègue bleu est telle que même ce qui est vrai en comparaison paraît faux. Face à un tel argumentaire, je me mets à douter et à me questionner sur le sens profond de la vie et des éléments qui nous entourent. Afin de ne pas polluer le débat de paroles inutiles ou peu enclins à faire avancer le schmilblik, je médite un instant sur ma prochaine réplique et observe le Roigada d’un regard inquiet. Une conversation d’une telle intensité dans un lieu aussi empreint de sagesse … Serons-nous à même de tenir la distance face à Théa et son Pokémon ? Disposons-nous réellement des arguments nécessaire ? Pour sûr. Je me gratte le menton et secoue lentement la tête de droite à gauche :
▬ …

Mon Pokémon plisse les yeux, sort son grimoire et énonce des vérités d’une profondeur infinie.
▬ …
HAN. Je recule à nouveau et me cache les yeux afin de ne pas être ébloui – paradoxal puisqu’il fait nuit – par autant de vérité. À l’écoute de cette tirade, je manque de hurler un « NANNI » digne des plus grands dessins animés de ma jeunesse. Les dires de mon camarade et les miens ont à mon sens déjà bien fait avancer la question. Il nous reste cependant tellement de zones d’ombres à éclaircir et des points à expliciter. Fort heureusement Théodora et son Pokémon sont là pour nous aider à mettre au clair toute cette affaire. Cela va prendre un temps fou mais ne vous en faites pas ! Nous avons toute la soirée devant nous. Oh oui. Nous avons tout le temps qu’il nous faut. Soit dit en passant, cette joute verbale visant à percer les mystères de notre monde a intrigué la faune locale. Plusieurs Feuforêve, Fantominus et Mimiqui nous observent.

Nous venons en quelques sorte de ranimer le cercle des philosophes disparus. Nul doute que ce Fantominus est la réincarnation du grand Karl Miamarx et que ce Mimiqui est doté du même esprit qu’Heideguériaigle. Silencieux, les Pokémons spectres nous observent, nous jugent et tirent des enseignements de nos discours respectifs. Ce cimetierre s’est soudainement transformé en amphithâtre où les plus grands sophistes collaborent afin de répondre à la question que nous nous posons tous : « … »