De l'eau a coulé sous les ponts depuis l'assaut de la base Anima. Une semaine de fragments de joie ayant eu le don de compléter le puzzle de ma santé mentale. Mais la rivière s'assèche, et dans son lit s'étouffe les fantômes lancinants de mon échec – et moi avec. Il y a une semaine, comme il y a huit mois, j'ai pris une décision : lutter contre la pieuvre tentaculaire. Et pourtant, il y a une semaine, comme il y a huit mois, je me suis rendu compte d'une triste d'une vérité : un homme a besoin de plus de puissance pour arriver à ses fins. Tant par son influence que par sa force de frappe.
Mais il est temps de changer le donne. De donner un coup de pied à la fourmilière, de faire tourner la roulette d'un casino d'escrocs, de balancer la table pour sortir vainqueur de la partie. Car ceci est l'unique échappatoire : montrer les crocs et jouer des épaules. Se frayer un chemin à travers la plèbe afin d'imposer sa volonté.
Aujourd'hui, le mouton blanc s'habillera de la fourrure du loup noir. Il ira au devant d'ennuis, ira froisser le destin. Son arme de destruction massive l'accompagnera. Sa créature mythique, légendaire. L'égérie d'une race de monstres hostiles à la race humaine que celle-ci s'entête à dompter. Mais il est temps de retourner aux sources. De goûter au frisson de la chasse, alors que bêtes et humains s'entre-dévoraient sous l’œil de bœuf de la loi du plus fort. Et je serai au sommet de la chaîne alimentaire.
* * *
Nidoqueen se fraie un chemin parmi les caillasses de Terra Nova. La roche se dérobe sous ses pieds. Nous longeons la mer depuis vingt bonnes minutes, empruntant des sentiers méconnus de l'homme pour atteindre l'inatteignable. Au loin, deux bras de terre embrassent une baie privée, emprisonnée. Des remous percutent le rivage ; un miasme d'écume dévore la pierre ; un crachin s'abat dans leur sillage.
C'est l'endroit.
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OST | Persecution of the Masses :
Nidoqueen s'engouffre dans l'arène naturelle. Elle hésite ; bascule son poids sur une jambe, puis l'autre. Ses pattes glissent sur une pierre ; elle tombe la corne en première dans le haut-récif. Des milliers de bulle remontent à la surface, chacune d'entre elles hurlant la douleur de leur maîtresse en éclatant.
— Relève-toi.
La créature dévoile une immense queue, ruisselante d'eau. Ses épines dorsales percent la surface alors qu'elle se redresse sur ses pattes arrières, la gueule se frayant un chemin jusqu'à l'air libre. Le sel marin ronge ses yeux rougis. Un filet de sang perle depuis son épaule meurtrie, un morceau de roche logé dans son cuir pourtant épais. Elle veut hurler. Mais ne le fais pas. Car Nidoqueen sait éperdument qu'une telle rage, qu'une telle colère, ne peut la mener que sur un unique et ultime chemin : le chaos. La peur de sa nouvelle taille l'empêche d'embrasser sa véritable puissance. Ectoplasma m'a rapporté ses dires : elle ne veut pas blesser ses proches dans sa furie meurtrière. Alors elle doit tenir les brides de sa conscience pour garder le contrôler malgré la fougue du combat – jusqu'à ce que chaos s'en suive.
— Avance vers les récifs. Frappe les stalagmites. Donne tout ce que tu as. L'eau ralentira tes coups, mais tu en ressortiras grandie. Pense à notre famille. Pense à ton maître. Pense à tous les danger que tu as évincé de par ta seule force. Il y en aura d'autres. Nous comptons tous sur toi. Tu es notre héroïne.
Je déballe la partition d'Ectoplasma comme un chef d'orchestre. Héroïsme, check. Sacrifice, check. Famille, check. Je capte l'attention de Nidoqueen et joue de sa corde sensible ; elle vibre et hurle son approbation vers les cieux.
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OST | Strategy Preparation/Black Angels :
Le sol tremble. La roche s'effrite à chaque secousse. Des morceaux de falaise s'écrasent dans l'eau, rejoignant le bassin d'écumes en pleine ébullition. Des éclairs illuminent les récifs ; un flash éclaire la queue de Nidoqueen percutant un stalagmite et le brisant en deux. Ses pattes monstrueuses empoignent le pic à deux mains ; la créature empale l'océan de gravier sous ses pieds d'une seule frappe.
Sa gueule brille d'une lueur violette. Je me couche sur l'herbe, les yeux greffés à mes jumelles. Un rayon ouvre la surface de l'eau en deux, percute la roche, s'étend jusqu'aux cieux, éventre un nuage. Un oiseau carbonisé chute depuis les hauteurs.
Je zieute les aiguilles de ma montre. Bientôt une demi-heure que la séance a commencé, et Nidoqueen n'a toujours pas baissé les bras. Au contraire, depuis les cinq dernières minutes, elle a redoublé de force et d'entrain, dégainant des as de ses manches pour dévaster son terrain d'entraînement.
Des bulles rougeâtres, noires, remontent à la surface. Une pierre noire, volcanique, s'étend autour du colosse. De l'obsidienne. La fissure s'étend : des racines de lave parcourent la plage. Le séisme me percute de plein fouet. Je m'accroche à une touffe d'herbe ; un pan de la côte se détache à vingt centimètres de mon épaule.
Je me relève en trombes, manque de trébucher, fuis l'épicentre ambulant. Une éruption volcanique me réchauffe l'échine. Je tombe. Me rattrape. Esquive les gerbes de magma. Nidoqueen hurle à la mort à chaque frappe, chaque souffle, chaque prise, chaque rayon d'énergie. Je balance mon regard de droite à gauche : la faune fuit le danger, effrayée par le torrent de fureur digne de Groudon.
Nidoqueen s'enivre de puissance.
Je m'enivre de puissance.
Il était temps.
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OST | Wonder Woman - Tina Guo :
« Journal de Troy, 18 juin 2017.
Fin de la neuvième séance d'entraînement. Premier compte-rendu.
Le premier terrain a été dévasté. Une équipe de Rangers m'a accosté dès le troisième jour après la multiplication de rumeurs sur un Camérupt enragé. Des nuages gris ont commencé à se former sur la côte de Terra Nova, près de Port-Lilas ; la température de l'eau s'est élevée de quelques degrés Celsius, repoussant les poissons de part et d'autre de l'île ; la baie privée s'est ouverte à la mer à cause de l'effondrement de la roche par les tremblements. Il fallait quitter l'endroit.
Nous avons changé de lieu, après une pause tournoi de pêche à Minami.
Un petite île rocailleuse a alors encaissé la colère implacable de Nidoqueen. Le même micro-climat infernal s'est installé. Des visiteurs trop curieux ont loué des barques pour se rapprocher du phénomène, le visage greffé à leur appareil photo. Un rayon a failli percuter l'un des bateaux et ôter la vie d'un pêcheur maladroit. J'ai réussi à apaiser la peur des civils en échange d'un marché à l'amiable. J'ai senti dans leurs regards qu'ils pensaient avoir découvert un filon inépuisable. Il fallait quitter l'endroit.
Nous avons changé de lieu, après une pause détente avec Nathaniel.
Des îlots perdus au milieu du néant nous ont accueilli les bras ouverts. Des oiseaux y avaient élu domicile avant notre arrivée. Trois jours plus tard, le relief subissait déjà le pouvoir tellurique de mon gardien suprême. L'île a gagné vingt centimètres de hauteur, le double en rayon, et une épaisse couche d'obsidienne recouvre maintenant le tout. Nidoqueen commence à canaliser sa puissance. Elle a passé la veille à essayer d'élever une montagne depuis les eaux à partir de rien.
Elle a réussi sur quelques centimètres. Puis s'est énervé et a anéanti son œuvre. Ce pouvoir de création et de destruction, de vie et de mort, me fait froid dans le dos. J'ai l'impression d'assister à la naissance d'un nouveau dieu ; ou du moins, au réveil d'un ancien dieu primitif que le monde a oublié. Les légendes contées par Caoimhe me trottent constamment à l'esprit. Je crains son pouvoir...
Une escouade d'adolescents s'est lancé le défi de nous pister à travers Mhyone. Je vais trouver un autre havre de paix pour soutenir Nidoqueen sans risquer la vie d'innocents. Ses pouvoirs sont de plus en plus conséquents. Une erreur, un pas de travers, une œillade mal considérée, et un accident pourrait s'avérer fatal.
J'ai failli y perdre la vie, aujourd'hui. »
HRP:
Et voilà pour RP d'entraînement avec Nidoqueen, depuis le temps que je voulais le faire. En utilisant deux décors pour réduire le coût du passage du rang C à B, puis du rang B à A.