Liberté chérie - Ft. Isara Nymly

Certes j’avais décidé de faire le grand tour avant de rentrer à Méridian mais pas au point de passer par Viridia. Enfin ça c’était la théorie, pendant ma traversée de la Plaine Versatile – cette fois sans qu’aucun Pokémon ne tente de me foncer dessus – j’avais reçu un message sur le Pokéweb d’un dresseur intéressé pour prendre soin de Sunny. Et évidemment, il habitait l’une des seules villes qui ne faisaient pas partie de mon trajet. Bonne poire, j’avais accepté de faire un détour. Après tout ce voyage avait pour but de me permettre de profiter de mes Pokémons et des paysages de Mhyone avant de m’établir de manière plus ou moins définitive dans ma ville natale. Je devais cependant avouer que j’en avais un peu marre de dormir à la belle étoile surtout que les nuits se rafraichissaient considérablement, tout comme il devenait difficile de se laver dans les rivières.

Il ne me fallut pas longtemps pour dresser le camping puisque j’avais tout un tas de pattounes prêtes à me donner un coup de main. Ils étaient tous adorables et le temps que la tente soit montée, il y avait déjà un agréable feu de camp qui réchauffait quelque peu l’atmosphère. Je manquais de motivation pour aller me laver, mais j’avais rendez-vous tôt demain matin et je n’étais pas sûre d’avoir le temps de passer par une auberge. Evidemment, je mis le moins de temps possible dans l’eau même si je profitais d’une source d’eau chaude personnelle. Hitokage adorait réchauffer mon bain naturel et je ne m’en privais pas. Une dizaine de minutes plus tard, j’étais sortie et rhabiller. Je préparais ensuite à manger pour tout le monde et pendant qu’ils dévoraient leur repas, je trainassai sur le web. Je n’étais pas une grande fan de la technologie et j’utilisai peu mon téléphone mais j’avais pris l’habitude de me tenir au courant des nouvelles depuis que la région se faisait attaquer tous les six mois. Je me méfiais pas contre et je ne prenais pas au mot tout ce que je lisais me rendant bien compte que le scandale prévalait souvent sur la réalité puisque que c’était plus vendeur… Ah l’Homme dans toute sa splendeur. Pour une fois, je tombais sur un article intéressant sur les fossiles. Il y avait tout de même une trentaine de dresseurs qui avait fait renaître le leur cette année. Cela me faisait penser que j’en avais justement un qui m’attendait chez mes parents. Je devrais peut-être songée à m’en occuper. Mais ce serait pour plus tard, une fois que je me serais établie. Pour l’instant, je ne me sentais pas d’intégrer un nouveau Pokémon à mon équipe alors que j’allais être accaparé par la mise en place de mon projet…

Le réveil aux aurores fut difficile même si je m’étais couchée tôt. Je pris la route en direction de Viridia et réussi à rejoindre assez rapidement la petite ville si bien que j’étais un peu en avance. Le dresseur m’avait donné rendez-vous dans un petit café à l’ambiance sympathique. Je patientai plusieurs longues minutes, eut le temps de commander deux autres boissons sans voir arriver personne. Une heure était passée et je dus me résoudre à l’évidence, le dresseur ne viendrait pas. J’étais contrariée, en partie parce je n’avais toujours pas de solution pour le Galvaran et aussi parce que j’avais perdu du temps pour rien, même si ce dernier point était relatif puisque j’avais profité de mes Pokémons…

Quand je finis par voir Nox Illum se dessiner au loin, j’étais fatiguée, d’humeur massacrante et je n’avais qu’une envie, c’était de passer une nuit à l’auberge ce qui tombait plutôt bien puisque la nuit approchait. Pas de chance du coup pour le mec à moto. Un autre jour, j’aurai peut-être laissé passer…

« Non mais ça va pas la tête ?! Tu balances souvent tes mégots en pleine nature, toi ? Et les Pokémons, tu y penses ? Danger public ! »

« Enchanté. Vous avez une poubelle ? »

Si jusque-là, je n’avais été qu’excédé par le comportement idiot de mon interlocuteur, sa remarque me donna envie de lui en coller une. Après je n’étais pas stupide même si j’étais impulsive et l’homme à la moto qui me faisait face avait l’air de sortir tout droit d’un mauvais film sur les gangs des cités. Un vrai cliché, voilà ce qu’il était avec son attitude irrespectueuse, sa clope et sa bécane sans parler du look. L’envie était forte de juste rire de son ridicule. Sauf que je n’étais pas d’humeur.

« J’ai l’air d’une poubelle ? »

Il ne me fallut que quelques secondes pour me rendre compte qu’il allait certainement répondre oui, juste pour la réplique et je soupirai avant de reprendre.

« Nan, laisse tomber, me réponds pas ! Bah écoute, tu mets ton mégot dans une boite et tu le jetteras dans la prochaine ville. Ca évitera que tu pourrisses la nature et que tu empoisonnes les Pokémons. »

J’avais l’impression d’être une vielle rabat-joie en train de faire la morale à un groupe de jeunes irrespectueux. Je devais me rappeler très fort que je n’avais même pas dix-huit ans et qu’il était certainement plus âgé que moi. Je savais que ce n’étais pas la peine d’espérer en appeler à son altruisme. Mais il semblait être un dresseur, en tout cas il était accompagné d’un Pokémon qui me toisait l’œil mauvais. D’ailleurs je surveillais discrètement Hitokage pour qu’il ne joue pas les gros bras et ne nous lance pas dans un combat dont je ne voulais pas.

« Je suppose que tu n’en as rien à foutre de la Nature, mais dis-toi que si tout le monde fait comme toi, il n’y aura plus de Pokémons à capturer… Ce qui ne te rendrait pas bien service ! »

Alors que je tentais de trouver un moyen de toucher le loubard, la colère gronda en moi et rendit ma voix sèche tout en fermant mon visage. Je savais que mes yeux transmettaient mes émotions. Mais je ne supportais pas qu’on s’en prenne aux Pokémons et je ferais ce qu’il fallait pour les défendre…

J’eus au moins le plaisir de le voir finalement ranger son mégot dans sa poche. Bon, je ne pouvais pas être sûre qu’il n’allait pas le jeter à nouveau au sol dès que j’aurais le dos tourné ou qu’il ne recommencerait pas les jours suivants mais cela suffit à me faire descendre de mes grands chevaux et ce n’était pas si mal surtout au vu de la tension que je communiquai à mes Pokémons. Je voyais bien qu’ils étaient tous sur le qui-vive et Hitokage était prêt à lancer le combat… Sa récente évolution lui donnant encore plus confiance en soi, déjà qu’il n’en manquait pas…

"Mauvaise journée, hein ? Ce n'est pas parce que tu te places en sauveuse des pokémons que cela te donne le droit de crier sur n'importe qui. Même si ma gueule te reviens pas."

Je soupirai aussi fort qu’il l’avait fait plus tôt, exaspérée par ses conclusions. Mauvaise journée ou non, j’aurai réagi de la même façon. Je ne supportais pas qu’on maltraite les Pokémons mais je savais que j’étais bien trop extrême et j’avais appris à mes dépends que malgré mes beaux principes, je pouvais également rendre un Pokémon malheureux… L’histoire de Sunny resterait gravée en moi, elle m’avait marqué de manière définitive et violente. Mais j’avais eu besoin de traverser cette épreuve pour en arriver là où j’étais maintenant…

"Tu allais à Nox, non ?"

Je fus surprise par la question qui n’avait rien à voir avec notre conversation, me demandant la raison de ce brutal changement de sujet. Est-ce qu’il essayait de me faire oublier mes sermons ? Surement et je ne pouvais pas lui en vouloir. Il tentait de désamorcer la situation explosive et je trouvais ça plutôt sympa, je n’allais donc pas relancer le débat, mais je voulais tout de même répondre.

« Alors mauvaise ou bonne journée, ça n’a rien à voir. J’ai du mal avec la maltraitance Pokémon, je reconnais que je suis un peu susceptible à ce sujet. »

C’était vrai et je ne m’en cachais pas alors autant être honnête et assumer mes actes. De toute façon, je n’avais jamais eu de problème à le faire. L’hypocrisie m’était étrangère mais au moins on pouvait faire confiance aux mots que je prononçais. Je ne disais rien que je ne pensais pas…

« Et pas vraiment, j’y passe juste pour rejoindre Méridian. Pourquoi cette question ? »

"Curiosité mal placée."

Avant même que je puisse répondre ou réagir, mon interlocuteur grimpa sur son engin de malheur, accompagné de son pokémon. Le moteur se mit à vrombir et quelques secondes plus tard, il ne restait qu’une mauvaise odeur dans l’air qui me fit grimacer. Visiblement la conversation était terminée…

En vrai, j’avais eu de la chance de m’en sortir à si bon compte. Il allait falloir que j’arrête de sauter à la gorge des gens qui ne me plaisaient pas. J’allais finir par m’attirer de sacrés ennuis avec cette sale habitude. Et même si j’avais mes compagnons qui me protégeaient, je savais que je m’en voudrais à mort si l’un d’eux était blessé par ma faute. Puis bon, Vixion me ferait la leçon s’il apprenait ce qui s’était passé aujourd’hui. Il était inquiet que ma tendance à agir avant de réfléchir ne m’attire des problèmes. Alors s’il savait que j’avais agressé un mec des quartiers parce qu’il avait juste jeté sa clope par terre, j’allais en entendre parler pendant un moment. Il avait raison dans le fond et je savais bien qu’il ne faisait ça que pour me protéger. L’homme à la moto avait laissé tomber parce qu’il n’avait pas l’avantage mais qui sait ce qui se serait passé s’il l’avait eu…

« Ça reste entre nous, hein ? »

Je me tournais vers me petite bande, histoire de leur faire comprendre que cette interlude pouvait parfaitement s’oublier rapidement et ne jamais ressurgir. Entre les pouvoirs psychiques de Tricho, les capacités de Mahiro et autres pouvoirs, ils étaient difficiles de garder un secret pour soit quand tout le monde était rassemblé. Mimy hocha la tête pour me faire comprendre que le message était passé et qu’elle allait veiller à ce que les plus jeunes ne fassent pas de bourdes. Je la câlinais affectueusement avant de me redresser. Nous reprîmes ensuite la route tranquillement. J’étais tout de même perdue dans mes pensées. Je me demandais si j’avais eu raison d’intervenir. C’était plus fort que moi et en même temps, je ne pourrais pas changer le monde, alors à quoi bon…